1-The Carousel 2.54
2-Terror In Bed 5.34
3-A Place For Everything 3.17
4-The Curtains 2.37
5-Curly Hair 3.09
6-The Picture Album 4.48
7-Return To The Carousel 3.09
8-Finaly Home 6.16
9-Home Safe 3.16

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Varèse Sarabande
VSD-6054

Produit par:
Jerry Goldsmith
Producteur exécutif:
Robert Townson
Directeur en charge de la musique pour Dreamworks:
Todd Homme
Monteur de la musique:
Ken Hall
Assistant de Mr. Goldsmith:
Lois Carruth

Artwork and pictures (c) 1999 Dreamworks L.C.C. All rights reserved.

Note: ***
THE HAUNTING
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Un remake de 'The Haunting' de Robert Wise? Pourquoi pas, sauf que lorsqu'on confie la réalisation d'un tel film à un tâcheron hollywoodien sans personnalité comme Jan De Bont, qui ferait décidément bien de rester directeur de la photographie et de cesser la réalisation, qui, à part une exception - 'Speed' - ne lui a jamais guère réussi, on ne peut que s'attendre à un résultat fort décevant. Cela n'a donc pas manqué. 'The Haunting' (Hantise) est une série-B d'épouvante typiquement hollywoodienne, avec tout ce qu'il faut d'effets spéciaux, de manoir hanté, mais très peu de frisson, alors que l'on était pourtant censé voir un film d'épouvante! Le scénario du film est restée le même que celui de 1963: Eleanor (Lili Taylor), Theo (Catherine Zeta-Jones) et Luke (Owen Wilson) ont été choisis par le docteur David Marrow (Liam Neeson) pour être les cobayes d'une expérience scientifique censée guérir leurs insomnies. Enfermés dans un immense et luxueux manoir, les cobayes apprennent à s'accommoder à leur nouvelle demeure tandis que le docteur étudie leurs moindres faits et gestes. Le manoir appartenait autrefois à un richissime industriel du 19ème siècle nommé Hugh Crain, un homme à la réputation cruelle. En réalité, l'expérience n'est qu'un prétexte pour une étude sur la peur et ses conséquences sur notre état psychologique, un fait que le scientifique s'est bien gardé de révéler à ses cobayes, qui souffrent tous d'insomnie pour diverses raisons. Très vite, Eleanor se détache du lot en manifestant une sensibilité exacerbée et très nette, surtout par rapport au lieu dans lequel elle se trouve. Elle ressent des choses, des murmures d'enfants, des vagues de froid, des statues qui semblent vouloir lui indiquer quelque chose, etc. Elle comprend très vite que ce manoir est hanté par des esprits et qu'il possède un terrible secret, un secret qu'elle va chercher à découvrir, alors que les autres pensent simplement qu'elle est victime d'hallucination. Pour résumer 'The Haunting', on pourrait dire que la première demi heure, assez lente, et plutôt pas mal sans casser trop pattes à un canard. Jan De Bont installe une atmosphère lugubre et inquiétante tout en maintenant un mystère constant et en affirmant progressivement la personnalité de l'héroïne incarnée par la toujours aussi talentueuse Lili Taylor. Puis, dès lors qu'apparaissent les effets numériques - spectres qui se glissent dans les draps, dans l'air, murs qui bougent, statues qui parlent, etc. - le film tombe dans un côté artificiel qui ne convainc guère, l'avalanche d'effets spéciaux réussissant à casser le suspense instauré par la première partie, comme souvent malheureusement dans ce type de film, preuve que le scénario, assez pauvre, ne tient finalement qu'à quelques artifices, qui une fois découverts, finissent très vite par lasser. En plus, le film manque cruellement de rythme, d'énergie. On en vient même à se demander comment un grand acteur comme Liam Neeson a pu accepter de participer à une bouse pareille, sans parler du personnage de Catherine Zeta-Jones, en lesbienne artificielle au maximum (remarquons au passage que les scénaristes ont tenus à édulcorer l'homosexualité sous-jacente du personnage, pourtant bien présente dans la version de 1963) qui n'apporte pas grand chose à l'histoire, à l'instar du personnage d'Owen Wilson, d'une platitude impressionnante voire spectaculaire. Personnages inexistants, situations prévisibles vues maintes et maintes fois, effets spéciaux gros et pas crédibles pour un sou, scénario maigrichon, tels sont les ingrédients de ce remake insipide du film d'horreur de Robert Wise. Si vous voulez avoir peur, ce ne sera en tout cas pas avec 'The Haunting'. Vous êtes prévenus!

Du coup, Jerry Goldsmith tente de faire ce qu'il peut avec sa partition symphonique, qui cherche à installer tout au long du film une atmosphère lugubre et terrifiante que le film a bien du mal à créer. Ce qui marque à la première vision du film, c'est l'absence de musique durant certaines scènes, Jan De Bont ayant tenu à privilégier les bruitages et les sons en tout genre afin d'accentuer l'atmosphère oppressante de ce manoir hanté. Néanmoins, la musique de Goldsmith reste très présente dès le début du film, contribuant à alimenter le côté mystérieux de cet immense manoir et de ses sinistres secrets. La partition s'articule autour de trois thèmes principaux. Le premier est confié à des cordes amples et associé au manoir hanté, thème aux notes descendantes que l'on entend dans la seconde partie de 'The Carousel', qui nous introduit une petite valse de carrousel/fête foraine que l'on entend dans le film lorsque Theo et Eleanor découvrent l'immense carrousel dans une pièce du manoir. Le second thème est associé quand à lui aux mystères du manoir de Hugh Crain, thème que l'on entend ici aussi dans la première piste de l'album, 'The Carousel', à partir de 0.59, entonné par des cuivres graves menaçants, et dont le caractère mélodique/harmonique évoque par moment Ravel voire Debussy (rappelant au passage certains motifs de 'Poltergeist', autre grand score du maestro californien pour un film de maison hanté, réussi, lui). Enfin, le troisième thème se démarque totalement des autres puisqu'il est associé à Eleanor, thème plus émouvant, doux et fragile, joué par une flûte, une harpe et des cordes, et que l'on découvre dans 'A Place for Everything'. Ce très joli thème rappelle certaines jolies mélodies que le compositeur a écrit pour des films tels que 'Rudy', 'Star Trek Insurrection' ou 'The River Wild'. Goldsmith apporte un peu de poésie et de retenue à un score somme toute très sombre et oppressant, contrebalançant habilement la noirceur de la plupart des morceaux de la partition de 'The Haunting', tout en évoquant la sensibilité et la fragilité du personnage de Lili Taylor. Comme souvent, le compositeur aime aller au plus profond de l'émotion d'un film, apportant ici au personnage un certain charme, une poésie qui illustre au passage le lien mystérieux d'Eleanor avec les enfants qu'elle cherche à protéger, d'où le côté apparemment naïf et simple de la mélodie associée à l'héroïne, que cette dernière chantonne dans le film comme un petit refrain de berceuse enfantine. Ainsi, avec ces trois principaux thèmes, Jerry Goldsmith nous explique clairement l'essentiel du film à travers sa musique, ce qui est déjà un bon point.

Le reste du score s'avère en revanche être particulièrement plat et sans grand relief. Jerry Goldsmith applique comme d'habitude toutes ses recettes sans jamais trop se fouler. 'Terror in Bed' est l'exemple même du Goldsmith des musiques de thriller/action qui recycle ses formules habituelles, avec toujours cette même efficacité et ce professionnalisme systématique, mais sans aucune once d'originalité. Cordes dissonantes, synthétiseurs atmosphériques et cuivres massifs avec percussions agressives suffisent à créer une ambiance de terreur pour la scène où Eleanor se retrouve piégée dans son lit par le fantôme de Hugh Crain, qui contrôle le manoir entier. On retrouve clairement ici le style horreur/thriller de 'Deep Rising' ou le suspense de 'Executive Decision', autant de références qui traversent la partition de 'The Haunting' tout en apportant aux images une certaine énergie, même si le compositeur semble ne pas toujours trop y croire - il l'expliquait dans une interview datant de 1998, que le cinéma hollywoodien étant devenu ce qu'il est aujourd'hui, il n'a plus de défi à relever et se contente uniquement de faire ce qu'on lui demande, point. La musique de 'The Haunting' est ainsi symptomatique d'un système hollywoodien sclérosé qui force l'un des plus grands compositeurs qu'Hollywood ait jamais connu à se recycler continuellement, à brider totalement son goût pour les audaces, les recherches musicales (goût qu'il possédait pourtant dans les années 60/70, à une époque où le cinéma permettait encore aux compositeurs d'avoir un point de vue musical personnel). Et pourtant, malgré ce constat très sévère mais ô combien réaliste, Jerry Goldsmith persiste à faire son travail avec professionnalisme et efficacité, même sur les pires nanars et navets en tout genre. On pourra ainsi apprécier la qualité de passages à suspense tels que le mystérieux 'The Curtains' (scène des fantômes traversant les rideaux) avec ses cordes dissonantes et ses synthétiseurs mystérieux associés aux esprits, traversé de quelques brefs rappels au célesta du thème d'Eleanor, l'inquiétant et oppressant 'The Picture Album' lorsqu'Eleanor découvre le secret d'Hugh Crain et consultant un ancien album familial ayant appartenu à la famille du richissime industriel, sans oublier les excellents morceaux de terreur que sont 'Return to the Carousel' qui installe une atmosphère d'urgence, de menace et de danger personnifiant le fait que les protagonistes sont piégés dans le manoir, sans oublier le grand climax du film, le massif 'Finally Home' et ses cuivres/cordes puissants et grandioses sur fond de rythmiques électroniques (un autre 'tic' familier du compositeur), le compositeur nous offrant un dernier rappel du joli thème d'Eleanor et du thème du manoir dans 'Home Safe'.

Vous l'aurez donc compris, 'The Haunting' ne révolutionne en aucune façon le genre de la musique d'horreur/thriller et joue au contraire la carte d'une certaine retenue. Ici, point d'orgue, de choeurs gothiques et de déchaînements orchestraux, en dehors de trois ou quatre morceaux plus massifs. Goldsmith a opté pour une approche orchestrale somme toute réduite au strict minimum, personnifiant plus le mystère, l'inquiétude et la sensibilité de l'héroïne tout en délaissant le côté gothique/maison hanté. Cette approche musicale réussit plutôt bien au film, même si l'ensemble manque cruellement d'ambition, d'originalité, de fantaisie. Appliquant ses traditionnelles recettes orchestrales/électroniques avec une rigueur exemplaire, Jerry Goldsmith nous livre donc un nouveau score horreur/thriller réussi mais sans grande originalité, qui confirme bien le fait que le compositeur n'a rien à prouver et se contente aujourd'hui d'appliquer les recettes qui fonctionnent là où il faut, au moment où il faut, avec un professionnalisme constant mais sans une once d'originalité. Dommage, car on se serait peut-être attendu à quelque chose d'un peu plus accrocheur et ambitieux de la part du maestro californien! A réserver surtout aux aficionados du compositeur!


---Quentin Billard