Film Soundtrack

1-Main Title 4.53
2-Friendly Advice 2.01
3-A Sleepless Night/
Checking Up 3.19
4-Snow Country 1.14
5-Wild Horses 3.30
6-Bronco Bustin' (revision) 1.57
7-Bronco Bustin'
(original version) 1.59
8-Cattle vs. Sheep 1.10
9-Quiet Thoughts 2.35
10-The Cemetery/Red Snow 1.58
11-The Knife 3.19
12-Old Times 3.40
13-Final Destination 2.14
14-End Title 1.54
15-Main Title 3.31*

Album Recording

16-a) Early Morning
b) The Wild Rovers 4.26**
17-Friendly Advice 1.57
18-Wild Horses 3.47
19-Snow Country 2.04
20-Old Times 4.00
21-The Knife 3.38
22-Bronco Bustin' 2.03
23-Sleepless Night 2.58
24-Saturday Night 2.26
25-a) Final Destination
b) Texas Rangers 6.03***
26-End Title: Wild Rovers 2.00

Bonus Tracks

27-Little Purple Poppy 1.35+
28-Ballad of The
Wild Rovers 1.50++

*Interprété par Sheb Wooley
Paroles de Ernie Sheldon
Musique de Jerry Goldsmith
**Interprété par Ellen Smith
Paroles de Ernie Sheldon
Musique de Jerry Goldsmith
***Interprété par Ellen Smith
Traditionnel arrangé par:
Jerry Goldsmith
+Interprété par Betty Wand
++Interprété par William Holden

Musique  composée par:

Jerry Goldsmith

Editeur:

Film Score Monthly
FSM Vol 6 N°15

Album produit par:
Lukas Kendall
Album original produit par:
Jerry Goldsmith

Artwork and pictures (c) 1971/2003 Metro-Goldwyn-Mayer (MGM)/Film Score Monthly. All rights reserved.

Note: ***1/2
WILD ROVERS
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by Jerry Goldsmith
Blake Edwards est surtout connu pour ses comédies telles que la série des 'Pink Panthers', la célèbre série TV 'Peter Gunn', sans oublier des films en tout genre tels que 'Mister Cory', 'Operation Petticoat', 'Breakfast at Tiffany's', 'Days of Wine and Roses', 'A Shot In The Dark', etc. En revanche, certains de ses films sont complètement tombés dans l'oubli et c'est le cas pour 'Wild Rovers' (Deux hommes dans l'Ouest), western dramatique et audacieux qui évoque l'amitié solide entre deux employés de ranch reconvertis en pilleurs de banque. L'histoire se passe dans le Far-West américain des années 1880. Ross Bodine (William Holden) et Frank Post (Ryan O'Neal) travaillent tous les deux dans le ranch de Walter Buckman (Karl Malden). Ce dernier est profondément attristé par la mort de l'un des ses amis, tué accidentellement par un cheval. Buckman charge alors Ross et Frank de ramener le corps en ville pour y être enterré. Sur le chemin, les deux hommes apprennent à se connaître et finissent par sympathiser après avoir pris une bonne cuite et provoqué une bagarre dans un saloon. Ensemble, ils discutent d'un projet qui leur tient particulièrement à coeur: avoir leur propre ranch au Mexique et mener une existence dorée. Pour se faire, Frank et Ross n'ont qu'une seule solution: ils vont dévaliser une banque afin de mener à bien leur projet et changer définitivement de vie. Mais le destin en a décidé autrement pour eux, comme si tout était écrit d'avance. 'Wild Rovers' est un western bien particulier dans le sens où le réalisateur s'attarde plus sur l'amitié entre les deux hommes que sur les traditionnelles chevauchées ou fusillades inhérentes au genre. Bien entendu, 'Wild Rovers' ne manque pas non plus de ces éléments, mais ils sont simplement minimisés au profit d'une mise en scène plus lente et sobre, parsemé de ralentis audacieux et hypnotisant. On pourra parfois trouver ces éléments un peu bizarres et décalés, mais le résultat fonctionne plutôt bien, même si le ton lent et finalement mélancolique du film tend parfois à rendre ce western relativement ennuyeux et plat. C'est ce côté psychologique et tragique qui surprend ici (en plus de ces quelques explosions de violence brutalement amenées dans le film), Blake Edwards nous ayant finalement peu habitué à cela dans sa longue filmographie. Il est surtout assez étonnant que le réalisateur ait choisi un genre aussi atypique pour se livrer à un tel exercice de style. Si 'Wild Rovers' commence de manière tout à fait conventionnelle, c'est pour mieux sombrer dans le drame au fur et à mesure où l'on comprend que les deux hommes sont livrés à eux-mêmes et réservés à un sort funeste inéluctable. C'est aussi l'occasion pour le réalisateur de nous rappeler que le Far-West n'était pas une période aussi prospère et joyeuse comme on peut parfois nous le montrer dans certains westerns de l'époque. Une sorte d'anti-western en somme!

Alors que Blake Edwards avait l'habitude de collaborer avec Henry Mancini sur la plupart de ses films, c'est finalement le grand Jerry Goldsmith qui composa la musique de 'Wild Rovers'. Il semblerait d'ailleurs que ce soit le score de 'Patton' (1970) qui ait convaincu Edwards d'engager le maestro californien sur son anti-western. Pour Goldsmith, il s'agit en fait de sa neuvième exploration du monde du western après 'Black Patch' (1957), 'Lonely Are The Brave' (1962), 'Rio Conchos' (1964), 'Stagecoach' (1966), 'Hour of The Gun' (1967), 'Bandolero!' (1968), '100 Rifles' (1969), 'Rio Lobo' (1970). La partition de 'Wild Rovers' est, à l'instar de celle de 'Bandolero!', une musique absolument monothématique, dominée par ce thème principal aux accents de Folk-Song de l'Ouest américain. Pour se faire, Goldsmith s'est inspiré du style d'un motif déjà entendu dans le ballet 'Billy The Kid' de l'incontournable Aaron Copland, figure emblématique inévitable dans le domaine de la musique américaine. En ce sens, on ne sera pas surpris de retrouver quelques similitudes entre 'Billy The Kid' et le thème de 'Wild Rovers', mais l'influence de Copland est quasi avouée et reconnue, une sorte d'hommage évident à l'un des musiciens les plus influents dans l'univers musical de l'Americana telle que le conçoit le cinéma hollywoodien depuis quelques décennies déjà.

Avec son traditionnel 'Main Title', le maestro nous introduit à ce superbe thème principal qui n'apparaît ici qu'après un passage particulièrement sombre dominé par une basse menaçante et répétitive. C'est dès les premières secondes du film que le thème apparaît brièvement, entonné par une trompette piccolo aiguë (NDLR: la justesse de l'instrument laisse quelque peu à désirer ici!) et doublée par une clarinette au son strident, sur fond de basse menaçante, une ouverture bien sombre et inquiétante qui annonce déjà tout le côté dramatique du film de Blake Edwards. L'harmonica traditionnel évocateur des contrées de l'Ouest américain sauvage reprend le thème accompagné par une guitare, un banjo, un petit accordéon, des vents et des cordes, la musique décrivant la vie paisible des cow-boys dans le ranch de Walter Buckman avec une mélodie mémorable au son du sempiternel Americana. Le thème sera sans cesse développé tout au long du film, et ce de manière incessante, à tel point que l'on pourra peut-être regretter le fait que le thème soit un peu trop présent et répété tout au long du film. A noter que, dans le film, la seconde partie du 'Main Title' a été remplacé par une portion de 'Wild Horses' qui sied mieux au début du film dans le ranch des cow-boys.

Dans 'Friendly Advice', Ross et Frank se rencontrent au son d'une pièce plus légère mais non dénuée d'une certaine amertume qui semble déjà annoncer un destin bien sombre pour les deux héros. On retrouve ici les orchestrations étoffées habituelles du Goldsmith des 'seventies' (vents, cordes sombres, cuivres dont trompettes avec sourdine, percussions en bois, etc.), auxquelles viennent s'ajouter la guitare et l'harmonica pour le son 'cow-boy' du score. La musique est utilisée avec parcimonie tout au long du film, et même si l'on n'entend qu'une quarantaine de minutes de musique durant tout le film, le score laisse malgré tout une impression assez mémorable, surtout dans la façon dont le réalisateur privilégie l'utilisation de la musique dans certaines séquences sans dialogues, preuve qu'Edwards appréciait beaucoup le travail de Jerry Goldsmith.

'Wild Horses' est sans aucun doute LE morceau incontournable du score de 'Wild Rovers', utilisé dans la séquence où Ross et Frank tentent de dresser un cheval sauvage. Avec une introduction très entraînante aux cordes, Goldsmith apporte une touche d'humour amusante à la scène avec l'utilisation d'un piano honky-tonk dans le style des traditionnelles musiques de saloon dans les far-west. Goldsmith est ici à la limite de la pastiche, un élément surprenant qui apporte une certaine énergie à cette scène filmée avec un étonnant ralenti envoûtant. Goldsmith en profite pour nous dévoiler le thème principal sous la forme d'une chevauchée majestueuse dominé par la trompette, les percussions, les cordes et les cuivres. On notera l'utilisation de quelques notes de banjo pour le son 'americana', tandis que le compositeur s'amuse à développer par la suite le thème sous une série de variantes durant toute la scène grand plaisir. La musique crée ici une ambiance quasi particulière, un élément majeur dans la séquence à tel point que cette dernière n'aurait presque aucun sens sans l'apport de cette musique!

Mais les choses se corsent par la suite, car après l'agité 'Bronco Bustin' qui reprend le thème principal sous une série de variantes avec des traits de cordes en octaves assez virtuoses, c'est l'impressionnant 'Cattle vs. Sheep' qui vient rompre violemment le climat entraînant et guilleret du début pour la scène de la mort de Buckman. Cette scène est tournée sous la forme d'une soudaine explosion de violence, amplifiée par un nouveau ralenti particulièrement impressionnant et sans bruitages. Une fois encore, Edwards privilégie ici la musique de Goldsmith qui nous propose pour cette séquence un terrifiant morceau atonal chaotique et d'une noirceur étonnante pour la scène. Le maestro a amplifié avec férocité la violence de la scène en nous proposant un commentaire musical quasi cauchemardesque et à la limite de l'expérimentation, surtout dans l'utilisation discrète de l'électronique en arrière-plan sonore. On retrouve ici le grand Goldsmith expérimental de 'The Mephisto Waltz', composé la même année que 'Wild Rovers'. Il est certain que 'Cattle vs. Sheep' a de quoi surprendre, surtout dans le contexte d'une musique de western qui, généralement, délaisse ce style de musique plus souvent réservée aux films d'horreur ou aux thrillers. Goldsmith ne s'est pourtant pas privé de nous réserver ici une bonne surprise, et c'est tant mieux. Cuivres stridents et dissonants, clusters, synthé atmosphérique, glissendi de cordes, registres extrêmes des instruments, percussions brutales...les 1 minutes 10 de 'Cattle vs. Sheep' sont peut-être courtes, mais quel impact à l'écran! On aura rarement entendu une musique aussi brutale dans une musique de western, et quelle inventivité sur le plan instrumental!

Après 'Cattle vs. Sheep', aucun doute possible: 'Wild Horses' est décidément un western bien sombre et violent, loin du style auquel Blake Edwards nous a habitué au cours de sa carrière. La musique de Jerry Goldsmith se devait à son tour d'évoquer la noirceur quasi tragique du film, une sorte de démystification de l'univers souvent falsifié du far-west dans le cinéma hollywoodien. Goldsmith ramène la paix avec le très intime 'Quiet Thoughts' où il reprend le thème principal joué de manière paisible par une guitare et quelques instruments afin d'évoquer l'amitié entre les deux hommes, et ce malgré les épreuves qu'ils doivent endurer ensemble. 'Quiet Thougts' possède un côté plus nostalgique quasiment poignant à l'écran, et qui change radicalement de l'ambiance chaotique et brutale de 'Cattle vs. Sheep'. Ceci étant dit, 'The Cemetery/Red Snow' renforce le ton sombre de la deuxième partie du score alors que Frank a été blessé et qu'il laisse des traces de sang derrière lui.

C'est ce qui nous amène finalement au sombre 'The Knife', autre morceau extrêmement sombre, chaotique et brutal pour la scène où Ross doit couper la jambe de Frank avec un couteau chauffé à blanc. Les instruments semblent ici errer de manière plus hasardeuse, comme si la musique cherchait à retranscrire une sorte d'appréhension. On retrouve ici les effets sinistres de glissendi de cordes avec quelques brefs clusters de clavecin étonnant et des cordes quasi macabres. L'ambiance se veut particulièrement inquiétante, Goldsmith faisant monter la tension durant toute la séquence, tout en nous faisant comprendre que l'issue n'en sera que plus douloureuse pour Frank Post. On notera la dernière partie du morceau qui mélange de manière désordonnée et chaotique un motif d'accordéon emprunté à 'Wild Horses', le thème à la trompette, une guitare basse sautillante, des cordes tendues et des percussions brutales. Le mix entre ces éléments totalement disparates permet au compositeur d'accoucher astucieusement d'un moment de chaos musical particulièrement déroutant dans le film, dans la lignée du terrifiant 'Cattle vs. Sheep'.

Après cela, 'Old Times' et 'Final Destination' renforce l'ambiance dramatique et sombre de la fin du film, avec un thème principal qui essaie de revenir comme auparavant, mais sans jamais vraiment y arriver (et ce à l'instar des deux héros destinés à une mort certaine). Le film finira d'ailleurs sur un 'End Title' particulièrement sombre où règne une certaine ambiance de désolation, avant que le thème principal ne revienne une dernière fois, joué par une trompette solitaire et l'orchestre pour conclure le film en beauté. Au final, 'Wild Rovers' est une BO western particulièrement surprenante dans l'immense carrière de Jerry Goldsmith. Le score annonce dès les premières secondes du 'Main Title' une musique sombre et tourmentée qui ne va cesser de rivaliser avec quelques pièces orchestrales entraînantes comme 'Bronco Bustin' ou 'Wild Horses'. C'est l'inventivité des orchestrations qui prime ici, Goldsmith nous dévoilant quelques surprises pour les superbes 'Cattle vs. Sheep' ou 'The Knife', preuve que le maestro était plus que jamais au sommet de son art dans les années 70. Le score de 'Wild Rovers' fait partie des scores incontournables du compositeur, bien que l'on regrettera le simple fait que le thème ait tendance à revenir un peu trop régulièrement tout au long du film (on aurait préféré des passages plus variés à la place, ou des développements moins répétitifs). En tout cas, le résultat à l'écran est particulièrement intéressant, surtout si l'on considère la façon dont Blake Edwards a privilégié la musique de Goldsmith tout au long de son film, n'hésitant pas à la mettre pleinement en valeur au cours de passages sans bruitages ou lors de ralentis hypnotisants. Un excellent score western qui, à défaut d'être l'un des chef-d'oeuvres impérissables du compositeur, n'en demeure pas un score incontournable dans les musiques westerns du grand Jerry Goldsmith!


---Quentin Billard