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Musique composée par: Jerry Goldsmith Editeur: Réalisateur: Jack Smight Genre: Science-fiction/Thriller Avec: Jan-Michael Vincent, George Peppard, Paul Winfield. (c) 1977 20th Century Fox. Note: ***1/2 |
DAMNATION ALLEY
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ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
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Music composed by Jerry Goldsmith
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'Damnation Alley' (Les survivants de la fin du monde) fait partie de ces films de science-fiction/catastrophe totalement oublié mais qui faisaient leur petit effet à l'époque, à la fin des années 70. C'était l'époque des films catastrophes d'Irwin Allen et consort, un cinéma purement spectaculaire qui faisait bien souvent l'étalage de toutes les techniques d'effets spéciaux hollywoodiens des 'seventies'. Le film de Jack Smight (réalisateur lui aussi oublié), inspiré d'une nouvelle de Roger Zelazny, s'oriente plutôt vers le style 'post-apocalyptique' très en vogue à cette époque et au début des années 80. Dans le même genre, on pourra voir quelques années plus tard 'The Aftermath' de Steve Barkett (1982), 'Ravagers' de Richard Compton (1979), sans oublier les films traitant des catastrophes nucléaires tels que le poignant 'Testament' (1983) ou son concurrent direct réalisé la même année, le téléfilm 'The Day After' de Nicholas Meyer. On pourrait aussi citer pour finir 'Def-Con 4' de Tony Randel et Paul Donovan (1985), qui traite de la menace d'un satellite nucléaire sur le point de déclencher la troisième guerre mondiale. Dans 'Damnation Alley', c'est justement une attaque de missiles nucléaires en pleine troisième guerre mondiale qui ravage notre monde et détruit toutes les grandes villes des Etats-Unis. Comme très souvent, selon le point de vue nombriliste et tendance égocentrique des américains, la fin du monde signifie la destruction des Etats-Unis. Dans 'Damnation Alley', à aucun moment on entend parler du reste du monde: l'Europe a t'elle été touchée? Les pays asiatiques et orientaux sont-ils encore intacts? De ces détails pourtant majeurs, le script de 'Damnation Alley' en fait totalement l'impasse. Peu importe me direz-vous? Peut-être...toujours est-il que c'est à cela que l'on reconnaît un bon nanar hollywoodien peu crédible.
Après la catastrophe nucléaire qui a ravagé le monde et modifié l'axe de la terre, trois survivants de l'US Air Force réfugiés dans une installation militaire traversent les déserts post-apocalyptiques à travers le 'Landmaster', un gigantesque véhicule tout-terrain équipé d'une douzaine de roues et construit spécialement pour voyager dans des conditions difficiles. Tanner (Jan-Michael Vincent), Keegan (Paul Winfield) et le major Eugene Denton (George Peppard) se mettent en route, à la recherche de la ville d'Albany, la seule ville qui émette encore des signaux radios, apparemment épargnée par la catastrophe nucléaire - on se demande bien comment c'est possible, étant donné les retombées radioactives. Pour se faire, les trois hommes vont devoir traverser le 'chemin de l'enfer', un lieu hostile ravagé par des tempêtes et des conditions météorologiques rendues extrêmes par le changement de l'axe de la terre à la suite des explosions nucléaires. Sur le chemin, ils devront affronter des dangers en tout genre comme l'attaque de scorpions géants, de cafards tueurs, d'une tornade chaotique, de bandits du désert, etc. Le tout baigne dans le style typique des grosses productions de la fin des années 70, avec son lot d'effets spéciaux en tout genre (parfois kitsch mais néanmoins très impressionnants pour l'époque, comme pour la scène des explosions nucléaires au début du film), le principal défaut du film de Jack Smight étant surtout un manque de crédibilité quasi total (par exemple, la terre a beau être envahie par les retombées nucléaires, les héros ont quand même l'air de pouvoir se balader tranquillement dehors sans avoir à porter des combinaisons nucléaires. Qui peut croire un seul instant à un truc aussi pipeau?). Au final, 'Damnation Alley' se laisse regarder comme une petite série-B de science-fiction sans prétention, si ce n'est celle de nous resservir le sempiternel 'le nucléaire c'est pas bien, c'est dangereux pour l'humanité' qui trouve sa conclusion sur un irritant 'happy-end' stupide et pas crédible pour un sou. Le score de Jerry Goldsmith pour 'Damnation Alley' fait partie des partitions oubliées du compositeur, peut-être à cause du fait que ce score n'a jamais eu l'honneur d'avoir une édition officielle. Pourtant, grâce à la récente compilation 6 CD pour le 75ème anniversaire du maestro par Varèse Sarabande, il est désormais possible de retrouver quelques segments du score de Goldsmith, dont on pensait pourtant avoir perdu pour de bon les masters d'origine (comme quoi, il ne faut jamais désespérer). Le score de 'Damnation Alley' est typique des scores d'action du Goldsmith de la fin des années 70, dans un registre similaire à celui de 'Capricorn One' ou de 'The Swarm'. On y retrouve le style 'seventies' de Goldsmith avec ses orchestrations inventives, ses grosses musiques d'action atonales, sans oublier ses premières utilisations de l'électronique, encore assez peu utilisée en 1977 (on se souvient notamment des synthétiseurs kitsch futuristes de 'Logan's Run'). A noter que le compositeur n'a pas écrit beaucoup de score pour ce film, seulement près d'une trentaine de minutes de musique. Mais le peu qui nous est donné à entendre vaut vraiment le coup d'être écouté. Le ton est donné dès l'ouverture du score ('Main Title - The Missile Site') qui nous annonce une aventure à la fois sombre et mouvementée. Quelques trompettes développent un premier motif de 4 notes sur fond de cordes sombres jusqu'à ce que le motif principal de 6 notes fasse son apparition, suggérant une aventure mouvementée alors que le générique de fin nous introduit à l'intérieur du site de lancement des missiles. On ne pourra qu'apprécier le climat envoûtant, mystérieux et sombre de 'After The Holocaust' avec ses sonorités électroniques mystérieuses et ses effets de cordes qui décrivent le monde après l'holocauste nucléaire. Parfaitement intégrée dans l'orchestre, la partie électronique apporte son lot de mystère et décrit un monde livré aux retombées radioactives, d'où peut-être l'utilisation de l'électronique qui servirait alors à suggérer la présence des dangers qui menacent l'homme. 'After The Holocaust' nous permet surtout de retrouver un Jerry Goldsmith atonal, dans la lignée de ses premières partitions atonales telles que 'Freud', 'Planet of The Apes' ou 'The Mephisto Waltz', le compositeur ayant décidément un certain goût pour l'expérimentation, et plus particulièrement dans sa période créatrice des années 70. 'Into The Valley' confirme d'ailleurs ce goût pour une atonalité chaotique avec le premier morceau d'action du score basé sur le motif principal de 6 notes développé par des cordes sombres avec un excellent contrepoint entre le pupitre des cordes, des cuivres et des percussions (incluant xylophone, etc.). 'Into The Valley' décrit la séquence où l'un des héros traverse le désert en moto au début du film lorsqu'il se fait attaquer par des scorpions géants (cf. ici les effets spéciaux très 'cheap' des scorpions géants). A noter que 'Into The Valley' rappelle beaucoup par moment la brutalité et les rythmes martelés et syncopés de 'Planet of The Apes'. Plus mystérieux, 'The Land Master' décrit la traversée du désert à bord des deux grands Land Master à la recherche de la ville d'Albany qui émet toujours des signaux. Mais la partition de 'Damnation Alley', c'est surtout un morceau d'action particulièrement macabre et chaotique, 'Cockroach Attack'. En l'espace de 4 minutes, Jerry Goldsmith nous prouve à quel point il aime l'atonalité brutale et les effets orchestraux en tout genre. 'Cockroach Attack' annonce d'ailleurs par moment le style du futur 'Alien' (composé 2 ans plus tard). La pièce décrit la séquence où les héros sont attaqués par une horde de cafards tueurs dans une petite ville abandonnée. La brutalité de cette excellente pièce orchestrale extrêmement chaotique (le chaos étant l'idée majeure présentée ici) correspond à merveille à l'une des plus sombres séquences du film (à noter ici une reprise très énergique du thème de 6 notes). Il ne fait nul doute que 'Cockroach Attack' fait d'ailleurs partie des morceaux incontournables du score de 'Damnation Alley', si ce n'est LE morceau incontournable, véritable climax d'action chaotique et de terreur qui ravira tous les fans du Goldsmith atonal des années 70. Moins massif, 'Finding Billy' évoque la rencontre entre les trois survivants et le jeune Billy pour un petit morceau d'action plus léger où l'on retrouve une fois de plus l'inventivité instrumentale chère au Goldsmith des 'seventies'. Ultime morceau atonal chaotique, 'The Realignment' se concentre autour d'une écriture de cuivres particulièrement dissonante et sombre pour la séquence où l'axe de la terre se réaligne subitement vers la fin du film, débouchant sur une conclusion enfin paisible pour le seul thème véritablement mélodique du film, celui du joli 'Blue Sky'. Goldsmith confie ce très beau thème pastoral et lyrique à une flûte sur fond de cordes et de harpe, le compositeur exprimant ici la renaissance d'un nouveau monde qui ressuscite de ses cendres et le début d'un nouvel espoir pour un avenir meilleur. A l'écoute du magnifique 'Finale', difficile d'ailleurs de ressentir autre chose qu'une sensation de soulagement et de paix retrouvée, surtout après la noirceur de pièces sombres telles que 'Cockroach Attack' ou 'Into The Valley' (qui correspondent bien à l'univers post-apocalyptique du film). On reste quand même surpris par le fait que l'on soit obligé d'attendre la fin du film pour découvrir un nouveau thème qui n'apparaît à aucun autre moment du film (on aurait aimé l'entendre un peu plus développé et présent). Comme annoncé un peu plus haut, Goldsmith n'a pas écrit beaucoup de score pour le film de Jack Smight, à peine une demi heure. Evidemment, pour un score de cette envergure, c'est un peu court, d'autant que la trentaine de minutes de musique ne permet pas au compositeur de développer suffisamment ses motifs et son thème final, ce qui nous laisse finalement un peu sur notre faim, avec une sorte de sentiment d'inachevé. Evidemment, dans le contexte du film, la musique fonctionne très bien et reste un peu trop utilisée avec parcimonie. Devant la qualité de cette musique, on aurait quand même souhaité en entendre un peu plus, d'autant que l'enregistrement sur la compilation omet plusieurs bons passages du score, et plus particulièrement des scènes de traversée du désert où Goldsmith utilise un motif rythmique sur fond de synthétiseurs très années 70 ou d'autres morceaux d'action comme pour l'affrontement avec les bandits du désert. Gageons que devant le succès grandissant de ce score resté jusqu'ici relativement méconnu (il faut dire que le film est aussi difficilement trouvable - jusqu'à présent, il n'a toujours pas été édité en DVD), Varèse Sarabande devrait éditer dans le futur un album contenant l'intégralité de cette sympathique partition d'action qui fleure bon l'atonalité très 'seventies', et qui correspond à merveille à l'ambiance sombre et post-apocalyptique voulue par Jack Smight pour son film. ---Quentin Billard |