Après un premier épisode mémorable avec le regretté Brandon Lee et un second opus nettement moins inspiré avec Vincent Perez, voici de retour 'The Crow', célèbre héros d'outre-tombe revenu à la vie avec son fidèle corbeau afin d'assouvir sa vengeance. 'The Crow Salvation', réalisé par Bharat Nalluri, reprend le principe similaire de l'intrigue revancharde sur fond de castagne et de violence gratuite, matinée d'un soupçon d'effusions sanguinolentes. Alex Corvis (Eric Mabius) est condamné et exécuté à la chaise électrique, jugé pour un crime qu'il n'a pas commis. Sa fiancée Lauren Randall (Jodi Lyn O'Keefe) a été assassinée par une bande de flics ripoux parce qu'elle avait découvert quelque chose de compromettant pour ces flics corrompus et leur sinistre capitaine (Fred Ward). Ressuscité par le corbeau de l'au-delà, Alex Corvis ('Corvis' signifiant 'corbeau' en latin) revient à la vie et mène alors sa propre enquête pour retrouve les assassins de Lauren. Au passage, il croise le chemin d'Erin Randall (Kirsten Dunst), la soeur de Lauren, qu'il essaie de convaincre de son innocence. Il va en tout cas tout faire pour se venger des meurtriers et prouver ainsi son, innocence. Intrigue simpliste donc pour un film à la violence gratuite et à la mise en scène bien tendancieuse, genre clip MTV lambda. Si 'The Crow' d'Alex Proyas surprenait de par son ambiance résolument noire, son côté gothique pleinement assumée et la qualité de la mise en scène, 'The Crow Salvation' est un troisième épisode bien médiocre, qui aligne les scènes d'action banales, les effets spéciaux et les chansons hard-rock/metal comme s'il en pleuvait. Eric Mabius parvient largement à nous faire regretter Brandon Lee (mais pas Vincent Perez), le seul et unique 'The Crow'! A noter que le film s'est tellement avéré décevant durant les 'screen-tests' qu'il est sorti immédiatement en 'straight-to-vidéo' sans passer par les salles de cinéma. Pourquoi? Réponse évidente: un jour ou l'autre, dans les franchises, il faut s'avoir s'arrêter!

Après deux partitions obscures signées Graeme Revell, la musique de 'The Crow Salvation' a été confiée à Marco Beltrami, qui retrouve là son habituel style thriller/horreur influencé par ses précédents travaux pour 'Mimic', 'Scream' ou 'The Faculty'. On retrouve dès l'ouverture du film ce style d'atmosphère cafardeuse et glauque que Beltrami affectionne tant, annonçant clairement ici le style de 'Dracula 2000', 'Joy Ride' ou 'The Watcher'. Beltrami utilise ainsi cordes sombres, cuivres, rythmique électronique traditionnelle et voix féminine envoûtante, le tout mêlé dans un style atmosphérique et sombre qui annonce déjà tout l'univers noir du film. On est loin ici du style plus original et plus recherché du 'The Crow' de Graeme Revell, mais qu'importe, l'ambiance sied à merveille au film de Bharat Nalluri. Beltrami installe très rapidement cette atmosphère cafardeuse et sombre durant toute la première partie du film, multipliant les pièces atmosphériques avec son mélange cordes/synthé comme c'est le cas dans 'Evidence Room', où surgit brièvement une version tourmentée du 'Love Theme' (pour l'amour entre Alex et Lauren) sur fond de climat sonore macabre, évoquant les souvenirs douloureux d'Alex dans la salle des pièces à conviction au début du film. Ce 'Love Theme', véritable passage mélodique du score, est pleinement développé dans le joli 'Alex Visits Lauren's Grave', lorsqu'Alex se rend sur la tombe de Lauren. Mélancolique, le morceau se partage entre cordes, piano, vents et quelques synthés, installant une certaine atmosphère de tristesse bien souvent relayée par l'utilisation de la voix féminine qui évoque les souvenirs de Lauren et la vengeance inexorable d'Alex Corvis.

Evidemment, Beltrami nous gratifie de quelques passages d'action tonitruants à souhait, où l'on retrouve ses traditionnels déchaînements orchestraux hérités de la trilogie des 'Scream'. Ainsi, 'Houdini' évoque la première confrontation entre Alex et les flics ripoux, avec son lot de cordes dissonantes, d'une multitude d'effets électroniques, de percussions et de cuivres rageurs. 'Industrial Strenght Creeps' se rapproche plus du style horrifique de 'Resident Evil' avec son mélange de sonorités électroniques dans un climat assez malsain et qui convient très bien au film. Mais l'action atteint son climax de brutalité dans 'Chasing Sis' (un clin d'oeil au 'Chasing Sidney' de 'Scream'?), pour la violente confrontation finale contre le capitaine de la police. On retrouve ici les habituelles cordes stridentes aiguisées comme des lames de rasoir, les cuivres rageurs, le tout baignant dans cette atmosphère 'slasher' typique du Beltrami des 'Scream' pour cette confrontation finale, rendue réellement excitante par la musique du compositeur. Il est d'ailleurs dommage que l'on soit obligé d'attendre la fin du film pour enfin entendre une musique de terreur comme on les apprécie tant chez Marco Beltrami.

Il est de nouveau question de mélancolie dans le sombre 'Make Me Like You', avec cette voix féminine éthérée qui semble surgir de l'au-delà, comme pour rappeler le souvenir de Lauren et l'obstination aveugle et meurtrière d'Alex (vengeance parfaitement personnifiée par 'Slo-Mo Walking' - avec le plan d'Alex marchant au ralenti, comme pour évoquer l'inexorabilité de la justice du corbeau). On retrouve une ambiance dramatique poignante dans 'Investigating Key Club', pour une scène de flash-back de Lauren, où Alex se rend dans une boîte de strip-teaseuse, et découvre enfin, horrifié, la façon dont Lauren a tout découvert sur les flics ripoux. Les cordes s'allient ici à la voix féminine pour une véritable élégie poignante qui nous rappelle (timidement, hélas) à quel point Marco Beltrami possède aussi une véritable sensibilité musicale, bien au-delà de ses traditionnelles musiques horrifiques. Le film se conclut avec une jolie reprise du 'Love Theme' en guise de paix retrouvée.

'The Crow Salvation', c'est donc du Marco Beltrami sympa sans plus, nous resservant toutes ses formules d'horreur/thriller traditionnelles sans jamais réussir à les dépasser. Après les deux excellents scores de Graeme Revell, on était en droit de s'attendre à quelque chose d'un peu moins fade et de plus inspiré, mais qu'importe, la musique colle bien au film et crée l'ambiance sombre et macabre parfaite pour le film. Reste qu'un peu plus d'imagination aurait certainement été la bienvenue!


---Quentin Billard