Musique  composée par:

James Newton Howard

Editeur:


Réalisateur:
David Koepp
Genre:
Thriller/Drame
Avec:
Elisabeth Shue,
Kyle MacLachlan,
Dermot Mulroney.

(c) 1996 Universal Pictures/Amblin Entertainment.

Note: ***
THE TRIGGER EFFECT
ORIGINAL MOTION PICTURE SOUNDTRACK
Music composed by James Newton Howard
Voilà enfin un thriller intéressant au scénario original qui se hisse largement au-dessus des productions hollywoodiennes habituelles. 'The Trigger Effect' (Réactions en chaîne) est le premier long-métrage de David Koepp, réalisateur discret (il n'a réalisé que 4 films jusqu'à maintenant) plus connu en tant que scénariste d'Hollywood. Inspiré d'une série TV intitulée 'Connections', 'The Trigger Effect' se base sur une trame simple mais bien trouvée: une grande ville américaine se retrouve brusquement plongée dans le noir en pleine nuit à la suite d'un 'blackout', une panne de courant qui a atteint toute la ville. Personne ne sait quand le courant sera rétabli. Tout commence lorsque Matthew (Kyle MacLachlan) et Annie (Elisabeth Shue), un jeune couple d'une banlieue ordinaire, décident d'aller au cinéma. La soirée tourne au calvaire lorsque le couple doit subir l'agressivité de deux spectateurs récalcitrants. De retour chez eux, Matt et Annie retrouvent leur bébé malade. La nuit même, la panne de courant survient, plongeant toute la ville dans l'obscurité la plus totale. S'ensuit alors un chaos quasi général dans la ville: dans les magasins, on n'accepte plus que le liquide, les distributeurs de billet ne fonctionnent plus, on ne distribue plus d'essence, les téléphones ne fonctionnent plus, etc. Matt et Annie doivent impérativement obtenir le médicament pour soigner leur petite fille, mais le téléphone ne fonctionne plus. Matt décide alors d'aller demander d'urgence à un pharmacien du magasin du quartier le médicament en question, mais ce dernier refuse de le lui céder sans l'ordonnance du médecin (le téléphone ne fonctionne plus - et apparemment, les portables, ils ne connaissent pas!). Matt insiste, devient désagréable et fini par provoquer la colère du pharmacien. Excédé, Matt décide d'y retourner pour voler le médicament. Plus tard, son meilleur ami Joe (Dermot Mulroney) décide de venir lui rendre visite. Devant la montée des cambriolages et le chaos qui s'installe en ville à la suite du 'blackout', Joe conseille à Matt et Annie d'aller acheter une arme pour pouvoir se protéger en cas d'attaque. Le soir, Matt et Joe surprennent un cambrioleur en pleine nuit. Ce dernier est abattu par un voisin en pleine rue, alors que le cambrioleur ne portait même pas d'arme à feu. Pour ne pas être inquiété par la police, le voisin décide de glisser une arme dans la main du cambrioleur pour faire croire à un cas de légitime défense, et il s'assure que Matt va bien accorder ses violons avec lui en cas d'interrogatoire. Finalement, Matt, Annie et Joe décident de partir en voiture en siphonnant des réservoirs pour aller chez les parents d'Annie, mais ils ne sont pas encore sortis des ennuis.

'The Trigger Effect' est une excellente variation sur le thème des réactions en chaîne, qui se déclenchent ici à partir d'une panne de courant (un petit évènement en entraîne un autre, etc.). David Koepp nous montre ici une société moderne obligée d'en revenir à un mode de vie primitif, celui de la survie. Etrangement, la plupart des personnes sont montrée tout au long du film comme agressives, désagréables, irritables, y compris Matt, incarné par le toujours excellent Kyle MacLachlan, et ce dès le début du film, au cinéma. Même la relation entre Matt et son ami Joe est teintée d'une tension et d'une agressivité constante. Le film semble ainsi faire un constat assez pessimiste des relations humaines dans notre société moderne pourtant dite 'civilisé'. Finalement, Koepp filme des gens ordinaires dans une situation extrême et étudie leurs comportements par rapport à ces évènements et les réactions en chaîne qui en découlent, pour finalement aboutir sur un final pas si anodin qu'il n'y paraît: Matt décide de voler la voiture d'un fermier nommé Raymond (Richard T.Jones) qui a refusé de la lui donner parce qu'il ne lui faisait pas confiance. A son tour, Matt braque Raymond avec son fusil à pompe et décide finalement de lui faire confiance en baissant son arme pour aller emprunter sa voiture. Le message semble alors être clair: les rapports humains seraient beaucoup plus facilités si chacun pouvait se faire confiance mutuellement. Au final, voilà donc un thriller astucieux qui change un peu de la routine hollywoodienne habituelle!

James Newton Howard a signé un score atmosphérique de qualité, qui, sans être particulièrement original ou mémorable, nous prouve quand même les talents de musicien de l'un des plus grands compositeurs d'Hollywood. Le score est écrit pour orchestre (cordes et vents principalement) avec une bonne partie de synthétiseurs et un violoncelle soliste. Le générique de début ne dévoile pas encore le côté sombre de la musique (et du film) et s'ouvre au son d'une pièce de type rock avec batterie, basse, guitares, synthé et guitare électrique, dans un style qui rappelle par moment le James Newton Howard des années 80. Puis, très vite, la musique s'assombrit considérablement dès la scène dans la pharmacie, où Matt va voler le médicament. Howard commence alors à développer le côté atmosphérique de sa partition avec ses synthétiseurs et ses cordes sombres. Howard installe un climat de suspense assez captivant et parfaitement ancré dans les images du film de David Koepp. La scène où Matt se fait courser par le pharmacien et un policier est accompagné d'une rythmique électronique typique de James Newton Howard avec cordes et guitares (on retrouve ici le côté action de JNH). La musique paraît alors plus sombre, plus menaçante avec ces tenues de synthé mystérieuses lorsque tout commence à aller mal et lorsque - comme par exemple dans la scène où Annie découvre qu'elle connaissait le cambrioleur abattu par le voisin. C'est cette couleur atmosphérique qui domine essentiellement dans la première partie du film, accentuant la tension qui ne cesse d'augmenter tout au long du film.

On ne pourra qu'apprécier l'excellente utilisation du violoncelle qui, avec les cordes et les synthétiseurs, apporte une couleur particulière à la partition de 'The Trigger Effect' (cela annonce déjà le futur 'Snow Falling on Cedars'). La musique semble alors vouloir signifier le fait que les héros sont pris dans le piège de cette situation extrême, qu'il n'y a plus d'espoir, pas d'échappatoire (la panne de courant serait donc une sorte de métaphore de cette situation - plus de lumière). C'est ce que l'on ressent dans la scène où Joe embrasse Annie, sans aucun doute l'un des passages les plus sombres et les plus mystérieux du score. JNH nous fait alors entendre un passage plus rythmé pour la scène où les trois protagonistes principaux prennent la voiture pour partir chez les parents d'Annie. JNH installe ici un ostinato mélodique de synthétiseur avec le violoncelle soliste et une rythmique électronique discrète qui ressemble plus à une pulsation régulière. Le morceau ne cherche pas forcément à évoquer un éventuel espoir mais renforce quand même l'impression atmosphérique de la partition. La scène où Gary (Michael Rooker) vole la voiture de Matt, Annie et Joe est illustrée par le morceau le plus surprenant de tout le score. Effectivement, ce dernier se distingue par une utilisation inattendue d'une voix féminine aux sonorités quasi orientales, un élément surprenant sur les images de cette scène, preuve que JNH ne manque jamais d'idée. Le score finira de manière plus atmosphérique avec un dernier morceau de suspense glauque pour la scène à la ferme de Raymond, avant une conclusion paisible et lyrique avec cordes, vents et piano.

'The Trigger Effect' reste une BO correcte sans plus de la part de JNH. Malheureusement, comme le score n'a jamais été édité, il est relativement tombé dans l'oubli, ce qui est assez dommage. James Newton Howard nous prouve quand même qu'il a un don certain pour créer des partitions au suspense captivant avec une utilisation très convaincante de l'orchestre mêlé aux synthétiseurs. Sa musique pour 'The Trigger Effect' est l'exemple même du James Newton Howard atmosphérique qui, une fois encore, nous propose l'accompagnement musical parfait pour le film qu'il met en musique. Reste que, comparé à d'autres grandes oeuvres que James Newton Howard a composé à la même époque, 'The Trigger Effect' paraît relativement anodin. Peut-être est-ce parce que le score manque finalement d'un thème mémorable et que la musique demeure trop atmosphérique jusqu'à la fin?


---Quentin Billard