John Ottman
Compositeur assez atypique à Hollywood, John Ottman est arrivé dans le monde de la musique de film par hasard, alors que sa formation le dédiait plutôt aux travaux du cinéma. Né le 6 juillet 1964 à San Diego en Californie, Ottman étudia dans sa jeunesse à la School of Cinematic Arts et l’Université de la Californie du Sud en 1988. Plus jeune, Ottman commença à écrire de la musique et enregistrer des émissions radio sur des cassettes audio, en interprétant lui-même chaque voix et effets sonores, n’hésitant pas à solliciter ses voisins ou ses proches pour servir de guests. Le jeune Ottman étudia ensuite la clarinette durant toute sa scolarité et commença à s’intéresser aux productions audio et la réalisation de films, n’hésitant pas à transformer le garage de ses parents en un studio de cinéma. Ottman aurait par ailleurs ainsi réalisé plusieurs films dans son garage, concevant lui-même le montage et les bandes sons à partir de ses musiques de film fétiches. Pendant ses études à l’USC de Californie, Ottman réalisa plusieurs films qui furent remarqués, attirant l’attention d’un étudiant réalisateur qui lui demanda de remonter son film de thèse. Le résultat fut récompensé d’un prix étudiant et permit à Ottman de rencontrer un assistant de production qui allait changer le cours de sa carrière : Bryan Singer.

Ottman se retrouva ainsi à monter, bruiter et co-réaliser le premier long-métrage de Singer, « Lion’s Den », mettant en scène un jeune Ethan Hawke, qui se trouvait être un ami d’enfance du réalisateur. En 1993, John Ottman monta « Public Access », le premier long-métrage de Bryan Singer au cinéma. Suite au départ du compositeur originel du film, Singer demanda à Ottman d’écrire la musique de son film. Le résultat fut récompensé d’un prix du Grand Jury au Festival du film de Sundance en 1993. Ce fut finalement la consécration avec le deuxième film de Bryan Singer : « The Usual Suspects », en 1995. Ce grand classique du polar des années 90 fut récompensé de plusieurs prix et permit à Ottman d’écrire l’une des meilleures partitions de sa carrière et de se faire remarquer à Hollywood, en plus d’avoir monté le film tout entier. La même année, le compositeur s’est même essayé à la musique de jeu vidéo en signant le score de « I Have No Mouth And I Must Scream », développé par The Dreamers Guild et sorti sur PC et sur Mac.

1996 fut une année plus modeste pour Ottman, qui s’essaya à la comédie satirique « The Cable Guy » réalisée par Ben Stiller, avec Jim Carrey et Matthew Broderick. L’humour noir parodique du film permit à Ottman de signer un score référentiel mais hélas plutôt mineur dans sa carrière. En 1997, John Badham fit appel au compositeur pour écrire la musique de son thriller « Incognito », souvent considérée comme l’une des meilleures musiques à suspense du compositeur. Il écrivit aussi le score de « Snow White : A Tale of Terror » avec Sigourney Weaver, dans cette variante sombre et baroque du conte de Blanche-Neige. En 1998, Ottman composa le score de « Goodbye Lover » de Roland Joffé et retrouva Bryan Singer pour la troisième fois sur le thriller controversé « Apt Pupil », évoquant la fascination d’un ado pour le nazisme. Sa partition loufoque, brutale et étrange pour « Halloween H20 : 20 Years Later » de Steve Miner fut rejetée par la production, remplacée en grande partie par des musiques préexistantes des films « Scream » et « Mimic » de Marco Beltrami. Otttman devint rapidement un compositeur indissociable des thrillers et des films d’épouvante. Hélas, son travail sur « Lake Placid » en 1999 – où il retrouva Steve Miner un an après l’échec de « Halloween H20 » - n’est guère resté dans les mémoires, pas plus que son score pour la série-B « Urban Legends : Final Cut », réalisée par John Ottman lui-même.

Le début des années 2000 est plus laborieux pour le compositeur. Ce dernier multiplie les projets mais signe des partitions de qualité inégale, reflétant son manque de base dans la composition et ses techniques musicales – il reste un compositeur autodidacte en grande partie – Ses partitions pour « Bubble Boy » en 2001 ou « Pumpkin » en 2002 passent inaperçues, tandis que le compositeur se concentre à nouveau sur les thrillers avec « Trapped » de Luis Mandoki ou « Point of Origin » de Newton Thomas Sigel, réalisé pour la télévision. Seule sa musique pour « Eight Legged Freaks » d’Ellory Elkayem parvient à se hisser au dessus des autres grâce à son second degré irrésistible et son écriture old school rafraîchissante. En 2003, Ottman saisit l’opportunité de participer à la franchise « X-Men » avec le deuxième épisode réalisé par Bryan Singer – il n’avait pas pu faire le premier film en 2000 pour des questions d’emploi du temps – et signe la musique du thriller « Gothika » de Mathieu Kassovitz. 2004 est une petite année pour le compositeur qui livre une énième partition d’action/suspense peu inspirée pour « Cellular » de David R. Ellis. En 2005, Ottman remplace Christopher Young sur « Hide and Seek » et livre une partition horrifique passe-partout pour « House of Wax », sa première collaboration à un film de Jaume Collet-Serra. En revanche, Ottman renouvelle sa participation à un film de super-héros avec « Fantastic Four » en 2005, tandis que Shane Black lui offre l’occasion d’écrire une partition jazzy rétro et ironique pour « Kiss Kiss Bang Bang ».

Le duo Bryan Singer/John Ottman triomphe sur l’énorme succès de « Superman Returns » en 2006. Malgré son manque de formation musicale, Ottman tente de succéder aux thèmes mythiques de John Williams et livre une vaste composition symphonique épique pour le film, souvent considérée comme l’un des opus clé du musicien. Dès lors, les studios réalisent qu’Ottman peut aussi composer pour des films de super-héros et n’est pas qu’un spécialiste des films d’épouvante à suspense. En 2007, il signe la musique de « Fantastic Four : Rise of the Silver Surfer » et retrouve Singer sur le thriller historique « Valkyrie » avec Tom Cruise en 2008. Il collabore pour la seconde fois à un film de Jaume Collet-Serra sur « Orphan » en 2009 et signe sa première musique pour un film d’animation avec « Astro Boy », où il livre un score orchestral classique de grande qualité. L’année 2010 est peu conséquente pour Ottman en dehors de son score quelconque pour « The Losers ». Idem pour 2011 où il retrouve Collet-Serra sur le thriller « Unknown » avec Liam Neeson, musique co-écrite avec Alexander Rudd. En 2013, Ottman parvient néanmoins à signer l’une des partitions les plus ambitieuses de toute sa carrière et l’une des plus abouties : « Jack the Giant Slayer », de très loin sa meilleure partition pour un film de Bryan Singer. Le duo se trouve l’année d’après sur « X-Men : Days of Future Past ». Le film est plutôt bien reçu mais la musique d’Ottman est une vraie douche froide, surtout après le triomphe musical de « Jack the Giant Slayer ».

En 2016, il retrouve Shane Black sur « The Nice Guys » et Singer sur un autre film X-Men : « Apocalypse », pour lequel le compositeur compose un autre score riche, ample et ambitieux, qui parvient à faire oublier l’échec de « Days of Future Past ». On remarque ainsi que la carrière de John Ottman est plutôt inégale en terme de qualité, et ce depuis ses débuts dans les années 90. Le compositeur, qui s’est formé sur le tas au fil des années, a su profiter de son expérience en tant que monteur/réalisateur pour évoluer à Hollywood et signer quelques partitions-clé de l’époque. Il reste le musicien attitré de son fidèle complice Bryan Singer et semble avoir plus d’une corde à son arc, puisqu’il se diversifie depuis quelques années et parvient maintenant à travailler sur des projets plus variés et pas seulement des thrillers ou des films d’épouvante.